Présentation

«Quand j’étais enfant, dans ma ville natale de Widnes, au nord de l’Angleterre, j’avais mon arbre favori. Ce n’était pas vraiment le mien, mais je l’avais adopté. Ou plus précisément, il m’avait adopté. Avec mes frères, nous étions souvent assis en hauteur parmi les branches, en criant pour se parler, à l’abri des animaux sauvages qui rodaient sur le terrain, des vaisseaux spatiaux maléfiques qui nous attaquaient du ciel ou encore des navires pirates qui attendaient pour faire de nous des esclaves. Les arbres devenaient nos espaces de sécurité, nous étions cachés aux yeux du monde. Aujourd’hui, on me dit “photographe de paysage”, et l’on me demande souvent pourquoi je ne fais jamais de portrait. J’en ai fait bien évidemment, mais seulement d’arbres. Et quand on me demande pourquoi, je réponds souvent, presque en plaisantant, que les arbres, eux, n’ont pas besoin de se maquiller. Ils ne me parlent jamais, ils sont graphiquement superbes et n’ont pas l’air mécontents d’attendre dans le froid plusieurs heures pendant ces longues séances de pose. Véritables tours de dignité, les arbres offrent leur sagesse à ceux qui sont prêts à les entendre. Sujet pour les poètes et les peintres, les photographes et les philosophes, l’arbre a été décrit comme cet archétype universel qui unit le monde souterrain, la terre et le ciel. Depuis plus de 35 ans, j’ai le privilège de photographier les arbres de nombreux pays. Je suis très honoré de pouvoir offrir leurs portraits comme la marque de mon immense gratitude pour leur présence dans notre monde. Nous sommes tous redevables aux arbres, ils nous donnent tellement, et demandent si peu en retour.»

Né en 1953 au Royaume-Uni, Michael Kenna, qui vit actuellement à Seattle, bâtit depuis plus de trente ans un corpus consacré à la représentation du paysage. Il travaille exclusivement en noir et blanc et pratique souvent des poses lentes, la nuit, à l’aube ou au crépuscule. Il attache une grande importance au tirage qu’il réalise toujours lui-même. Ses photographies, véritables Eloge du Paysage, tant bâti que naturel, sont régulièrement exposées dans le monde entier, notamment à la Bibliothèque nationale de France qui lui a consacré une rétrospective en 2009.