Présentation
Peintre et graveuse de formation, Martine Mougin débute la photo en 1982. Elle expose plusieurs fois à Paris, et depuis 2005 voyage et participe à des résidences d’artistes. En 2012, elle participe au Mois de la Photo à Paris et expose dans la capitale sa dernière exposition sur les épines, un travail autour des ombres et des couleurs.
Quelque chose d’étrange est à l’oeuvre dans les photographies peintes de Martine Mougin qui procède de la dualité de leur nature : elles sont en effet tout à la fois composites et factices.
Constituées de polyptyques, elles superposent d’une part des images sans relation de sens immédiatement direct entre elles ; de l’autre, elles présentent des plages colorées, peintes sur le mode monochrome, dans une platitude matérielle qui confère à l’image une qualité d’application mécanique.
Ainsi, cette oeuvre s’offre-t-elle à voir d’emblée où précisément elle ne se fonde pas ; comme s’il s’agissait tout d’abord d’entraîner le regard à l’exercice d’une diversion pour l’obliger à revenir sur le terrain et quêter enfin l’exacte intention qui en gouverne le processus de création. En amont de sa dernière livraison, l’oeuvre de Martine Mougin est jalonnée d’images qui témoignent d’une totale curiosité pour tout ce qui est de l’ordre d’une transformation de paysage. Sa série de Meules, en
particulier, empruntées à la culture basque, couvertes d’une couleur nuit profonde et mystérieuse, participe d’un étonnement, voire d’un éblouissement, que surenchérit le motif lui-même par l’insolite de sa constitution et la puissance de sa charge symbolique. C’est à l’image de ce genre d’images ready-made, trouvées
telles quelles, dans l’incongruité d’une organisation de leurs sens et la surpr ise d’une métamorphose, que le travail de Martine Mougin s’est développé. Mais alors qu’il n’opérait jusque là qu’une simple saisie du réel pour le subvertir par la couleur et le renverser à l’ordre d’une artificialité iconique, il s’applique désormais à travestir ce réel en recourant au mode d’une association sémantique et formelle. L’ensemble des images nouvelles que Martine Mougin a constitué ces derniers mois font appel à divers
registres dont les termes opposés sont nature et culture et dont les points de convergence s’inscrivent dans une dialectique alternative du plein et du vide. Les plages de couleur monochrome qui recouvrent la quasi totalité de ses images, laissant seulement en réserve noire et blanche certains détails du motif photographié,
agissent comme des écrans de verre coloré destinés à « déréaliser » le sujet. Elles le tiennent à distance d’une connotation littérale en l’immatérialisant, comme on peut en avoir la sensation dès lors que l’on baigne dans une atmosphère uniformément colorée. Ce faisant, l’évidente intention de l’artiste est de désamorcer le sujet de son emprise au réel pour en révéler — il s’agit ne l’oublions pas, de photographie avant même que de peinture — une « vue » secrète et inédite. L’art de Martine Mougin relève ainsi une opération alchimique au sens le plus extrême, voire magique, du mot, d’autant qu’elle tient à taire le secret de ses manipulations et qu’aucune trace, ni aucun signe n’en témoigne.
La façon qu’elle a, par ailleurs, de jouer de combinaisons
de toutes sortes dans le montage de ses polyptyques met en évidence ce qu’il en est aujourd’hui de la part composite dans le fondement même de la création. .../...
Philippe Piguet.
Quelque chose d’étrange est à l’oeuvre dans les photographies peintes de Martine Mougin qui procède de la dualité de leur nature : elles sont en effet tout à la fois composites et factices.
Constituées de polyptyques, elles superposent d’une part des images sans relation de sens immédiatement direct entre elles ; de l’autre, elles présentent des plages colorées, peintes sur le mode monochrome, dans une platitude matérielle qui confère à l’image une qualité d’application mécanique.
Ainsi, cette oeuvre s’offre-t-elle à voir d’emblée où précisément elle ne se fonde pas ; comme s’il s’agissait tout d’abord d’entraîner le regard à l’exercice d’une diversion pour l’obliger à revenir sur le terrain et quêter enfin l’exacte intention qui en gouverne le processus de création. En amont de sa dernière livraison, l’oeuvre de Martine Mougin est jalonnée d’images qui témoignent d’une totale curiosité pour tout ce qui est de l’ordre d’une transformation de paysage. Sa série de Meules, en
particulier, empruntées à la culture basque, couvertes d’une couleur nuit profonde et mystérieuse, participe d’un étonnement, voire d’un éblouissement, que surenchérit le motif lui-même par l’insolite de sa constitution et la puissance de sa charge symbolique. C’est à l’image de ce genre d’images ready-made, trouvées
telles quelles, dans l’incongruité d’une organisation de leurs sens et la surpr ise d’une métamorphose, que le travail de Martine Mougin s’est développé. Mais alors qu’il n’opérait jusque là qu’une simple saisie du réel pour le subvertir par la couleur et le renverser à l’ordre d’une artificialité iconique, il s’applique désormais à travestir ce réel en recourant au mode d’une association sémantique et formelle. L’ensemble des images nouvelles que Martine Mougin a constitué ces derniers mois font appel à divers
registres dont les termes opposés sont nature et culture et dont les points de convergence s’inscrivent dans une dialectique alternative du plein et du vide. Les plages de couleur monochrome qui recouvrent la quasi totalité de ses images, laissant seulement en réserve noire et blanche certains détails du motif photographié,
agissent comme des écrans de verre coloré destinés à « déréaliser » le sujet. Elles le tiennent à distance d’une connotation littérale en l’immatérialisant, comme on peut en avoir la sensation dès lors que l’on baigne dans une atmosphère uniformément colorée. Ce faisant, l’évidente intention de l’artiste est de désamorcer le sujet de son emprise au réel pour en révéler — il s’agit ne l’oublions pas, de photographie avant même que de peinture — une « vue » secrète et inédite. L’art de Martine Mougin relève ainsi une opération alchimique au sens le plus extrême, voire magique, du mot, d’autant qu’elle tient à taire le secret de ses manipulations et qu’aucune trace, ni aucun signe n’en témoigne.
La façon qu’elle a, par ailleurs, de jouer de combinaisons
de toutes sortes dans le montage de ses polyptyques met en évidence ce qu’il en est aujourd’hui de la part composite dans le fondement même de la création. .../...
Philippe Piguet.